lundi 25 juin 2012

Dans l'armoire de Mémé...

En vrai, Mémé n'avait pas une armoire dans sa chambre, mais un vaisselier. Vous savez, ces meubles en deux parties, avec souvent au milieu une plaque de marbre et un miroir ?
Dans ce vaisselier se trouvaient les trésors de Mémé : des boîtes pleines d'autres petites boîtes, de photos d'Autriche, son pays natal, de bijoux, de morceaux de bijoux, de boutons, de bobines de fils, de perles, une collection de montres et une autre de jeux de cartes...
La vitrine centrale protégeait le biscuit de communion de Rodrigue, une photo de Tatie Renée, en noir et blanc, splendide, des pierres précieuses, une rose des sables, pleins de bibelots.


Mémé m'a donné mes premières perles, des rouges, des bleues transparentes et des rocailles plus grosses orange et noires quand nous sommes arrivés chez elle en 1993 pour y vivre "momentanément", en fait douze ans durant. J'ai enfilé mes premiers colliers assise sur le lit de ma chambre. Mon petit matériel était stocké dans le cosy.
Mémé m'a également donné des chutes de fil à canevas pour mes premiers bracelets brésiliens. Mon autre Mémé en fera par la suite autant.

Mémé est partie en 2005. Elle n'avait pas d'argent, mais nous a laissé le plus précieux des héritages (matériels) : un vaisselier aux boîtes à trésors.

Capulana

En 2008-2009, j'étais tutrice CNED (préceptrice) de deux loulous au Mozambique, pendant que le troisième faisait la sieste. Là-bas, j'ai découvert tout un tas de merveilles et faits culturels, comme les "capulanas". Je vous copie-colle ci-dessous un article que j'avais écrit dans ma petite gazette (mail mensuel aux proches) à ce sujet.

"Une capulana, c’est ce qu’on appelle « kanga » au Kenya ou encore « pagne » en Afrique de l’Ouest, au Congo ou au Sénégal. C’est ainsi une pièce de tissu d’environ 1.10x1.80m (si elle n’est pas coupée comme il faut, elle perd son « âme ») aux multiples usages. Je vais [...] vous citer [...] un passage du roman de Paulina Chiziane sur la polygamie, car elle donne une très bonne définition de la capulana :

« Un grand voyage est aussi mystérieux que les replis du destin. C’est pour ça qu’on donne toujours ce conseil : femme, emporte toujours ta capulana, pour te servir de couverture, s’il y a du soleil. Pour te servir de linceul, si tu rencontres la mort. Pour couvrir ton lit, si tu rencontres l’amour. Pour couvrir ton visage, si tu as honte. Pour couvrir ta nudité, si jamais tu perds tes vêtements, et cacher ta honte aux yeux du monde. Je suis venue pour un anniversaire, et j’ai fini dans le lit de l’amour interdit. Je n’ai pas apporté de capulana. Comment vais-je essuyer ces larmes, cette honte ? » (P. Chiziane : Le Parlement conjugal, une histoire de polygamie, éd. Actes Sud, Arles, 2006, p.94.).
 

Ce passage montre bien que la capulana accompagne les Mozambicaines dans tous les événements qui rythment leur vie : fiançailles, mariage, enterrements (quand il s’agit de la perte du mari, la femme se couvre la tête d’une capulana pour « couvrir ses larmes » ; toutes les autres femmes de la famille portent une capulana du même motif), mais aussi dans son quotidien. Ici, c’est flagrant : on voit des capulanas partout. Les dames en portent en jupe, au dessus des autres vêtements pour les protéger, les utilisent comme sac qu’elles transportent souvent sur la tête, enfin et surtout : la capulana sert à porter les jeunes enfants sur le dos ou le ventre (ce qui permet de donner facilement le sein). Quoi qu’elle fasse, la mère porte son enfant dans la fameuse pièce de tissu : à la cuisine, au champ, en faisant le ménage. A la maison, j’ai la chance de voir ce joli fait culturel tous les jours avec Angelina qui porte Zelito sur son dos régulièrement. De même, les rideaux et les nappes sont des capulanas.
L’usage des capulanas peut également être moins terre à terre. Par exemple, certaines pièces de tissu, aux couleurs et motifs particuliers (noir, blanc et rouge, soleils et triangles) sont exclusivement réservés aux « curandeiros », qui sont les sorciers et guérisseurs traditionnels, et font partie intégrante de leurs accessoires pendant les cérémonies.
Par ailleurs, des noms sont donnés aux motifs qui ornent certaines capulanas et ceux-ci sont souvent liés à des faits historiques ou grands événements (« la capture de Ngungunhane » en 1895 ou encore « l’invasion de sauterelles » qui s’est abattu dans le Sud du Mozambique en 1934). Ainsi, quand une personne d’un certain âge montre ses capulanas aux plus jeunes, c’est comme si elle lui donnait accès à des documents historiques.


En résumé, la capulana a une énorme charge symbolique. Pendant la colonisation, on l’a même associée à la rébellion. Le poète Virgílio de Lemos a été emprisonné pour avoir écrit en 1954 (je vous écris la version anglaise… Si vous voulez la version portugaise, faites signe) :

« (…) Ah ! So many unknown dead
the ones born later
shall not cry out in humiliation
bayete-bayete-bayete
time will have replaced the red and green kapulana
with kapulanas of many colours. (…)»

Il a bien sûr été accusé d’avoir manqué de respect au drapeau portugais. La capulana a ainsi, de fil en aiguille, été élevé au rang de symbole de la lutte contre la domination coloniale. De nos jours, si sa portée politique reste limitée, elle est utilisée en période électorale où l’on imprime dessus les symboles des partis, voire le portrait des candidats.

Si chaque femme au Mozambique possède au moins une capulana, beaucoup d’entre elles s’habillent désormais aux « calamidades », les marchés de vêtements de seconde main, qui sont en fait des dons des pays européens, revendus à moindre coût. C’est ainsi que la mode occidentale prend une place de plus en plus considérable au Mozambique, comme dans tous les pays africains. Ce phénomène provoque d’une part une évolution de la mode mozambicaine, qui emploie les capulanas dans la confection de vêtements à la forme davantage « occidentale » (personnellement, je me régale ! Je me suis déjà fait faire un certain nombre de jupes, pantalons, tuniques en capulana !). Cependant, en ville, on ne trouve plus de femmes qui travaillent dans le secteur des services en capulana. C’est pourquoi, à force de développement, la capulana court le risque de disparaître au long terme…"

Ces bijoux sont à voir dans ma boutique ALM...

J'ai choisi de rendre hommage à ces tissus chatoyants et splendides en créant des bijoux qui s'inspire de motifs africains (reproduit notamment sur du plastique fou), où la perle de rocaille noire est centrale. J'ai également l'intention de faire des bijoux avec des biais de capulana (Liberty from Maputo, hihi), c'est une façon de retourner les choses : faire que le développement fasse la promotion de ces étoffes et n'en soit pas forcément la cause de disparition.

Allez, je me lance !

La coccinelle semble avoir trouvé un refuge ! Hihi !
Bonjour !
Il y a peu, j'ai ouvert une petite boutique de bijoux fantaisie sur A Little Market. Ce n'est pas mon métier, mon but est d'amortir certains frais et pouvoir expérimenter d'autres choses (notamment de m'offrir une machine à coudre et d'apprendre à l'utiliser). Pour du vrai, je suis animatrice jeunesse...
En parallèle, il me semble intéressant et rigolo d'ouvrir un petit blog, pensant que ça me permettrait peut-être d'échanger avec d'autres personnes qui aiment les petites choses faites à la main, la photo, les merveilles trouvées dans les brocantes, la cuisine, les voyages...
Dans un premier temps, je vais vous donner les clefs pour comprendre les noms que je donne à mes petites collections... :-)
Je tiens à remercier mon frangin pour la jolie bannière, ma famille et mes amis pour m'avoir toujours encouragée quoi que je fasse et vous, d'être passés et avoir pris le temps de lire au moins cela !
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